Présentation résumée
L’Église Saint-Roch, située au cœur de la vieille ville, a été construite sur l’emplacement de l’ancienne église Saint-Paul, à l’initiative de la municipalité de Montpellier qui lança une souscription publique en 1861 en vue de son édification. Le bâtiment, achevé en 1867, ne correspond que partiellement au plan initial de l’architecte Jean Cassan qui avait prévu, en plus de la nef, un transept, un chœur, des absides et deux flèches. Les vitraux, réalisés par plusieurs ateliers, dont celui du peintre-verrier Louis-Victor Gesta, à Toulouse sont d’inspiration symboliste et art nouveau. La statue monumentale de Saint Roch en habit de pèlerin fut achevée par le sculpteur montpelliérain Auguste Baussan en 1884.
Outre la chaire sculptée, chef d’œuvre d’ébénisterie de style néo-gothique, les tableaux du chœur, consacrés à la vie de Saint Roch, et ceux placés de part et d’autre de l’entrée méritent l’attention des visiteurs. Chaque année, lors de la solennité de Saint Roch, le 16 août, les reliques conservées dans le sanctuaire sont présentées au public.
Architecture
Comme d’autres églises de la ville, l’église Saint-Paul avait beaucoup souffert des affrontements interreligieux. Détruite lors du siège de Montpellier en 1622, elle avait été reconstruite entre 1625 et 1677. Dès le 17ème siècle, elle comporta une chapelle Saint Roch. Dans les années 1830-1840, des épidémies de choléra survenues dans la région suscitèrent un regain de ferveur pour le saint, enfant de Montpellier, qui donna bientôt son nom au sanctuaire. Grâce à l’action de propagande de l’Œuvre St-Roch, expression du renouveau catholique sous le second empire, et dans le cadre de l’ambitieux projet urbain voulu par le député-maire, Jules Pagézy, la reconstruction et l’agrandissement de l’église Saint-Roch furent proposés. L’architecte de la ville, Jean Cassan, conçut un vaste bâtiment qui évoquait l’idée de « cathédrale idéale » élaborée par le grand promoteur du néo-gothique, Viollet-Le-Duc. Son projet prenait modèle sur les grands sanctuaires gothiques du nord de la France et plus particulièrement sur N.D. de Châlons-en-Champagne (trois nefs largement éclairées par plusieurs rangs de vitraux et une grande rosace). La seule concession au gothique languedocien était la forme elliptique des piliers de la nef centrale, imités de ceux de l’abbatiale de Valmagne. La souscription émise par la municipalité ne permit pas de réunir les sommes nécessaires et la construction dut être arrêtée au transept avant d’être complétée par un chœur beaucoup plus bas de plafond, mais devenu lumineux grâce à un large vitrail posé en 1987, où l’on peut reconnaître Saint Roch, accompagné de son chien, cheminant devant une représentation de la façade de la cathédrale Saint-Pierre de Montpellier, suspendue entre ciel et mer. Les deux flèches et les éléments ornementaux extérieurs furent abandonnés. Le sanctuaire s’ouvre sur un large perron surplombant le quartier. C’est de là qu’est donnée, chaque 16 août, au terme de la célébration de la Saint Roch la bénédiction de la ville et celle des animaux de compagnie.
La décoration intérieure
La chaire, chef d’œuvre d’ébénisterie, a été conçue de manière à symboliser la mission de l’Église, depuis la révélation évangélique jusqu’à son accomplissement eschatologique. Les panneaux de la chaire représentent les quatre évangélistes, avec leurs attributs symboliques. Au-dessus, comme s’ils présidaient à la prédication, les pères fondateurs, Saint Paul et Saint Pierre représentent l’institution écclésiale, expression du Saint Esprit dans l’histoire humaine. Le chapeau de la chaire est porté par six archanges et surmonté par l’ange du Dernier Jour qui annonce le Jugement dernier.
Trois des quatre tableaux qui, dans le chœur, illustrent la vie de Saint Roch sont l’œuvre du peintre montpelliérain Auguste-Barthélémy Glaize (1807-1893). Influencé par le réalisme et l’éclectisme de Paul Delaroche, d’Ary Scheffer et d’Hippolyte Flandrin, Glaize fit une carrière parisienne et bénéficia de nombreuses commandes de l’État. Baudelaire, dans ses Salons, ironise sur son talent : « […] Tableaux qui visent à la couleur, et malheureusement n’arrivent qu’au coloriage de cafés, ou tout au plus d’opéra. » La chapelle, à gauche du chœur, contient un gisant représentant le saint, la statue de saint Roch utilisée lors des processions, et une autre, plus moderne et en bois, récemment offerte par l’artiste. Sur le mur de droite, un tableau d’Alexandre Cabanel, né à Montpellier, représente Le Christ au Jardin des Oliviers.
On remarquera, de part et d’autre du seuil de l’église, deux grands tableaux des 17è et 18è siècles en provenance de l’ancienne église Saint-Paul. Œuvres de peintres montpelliérains, ils représentent, l’un, la conversion de Saul, sur le chemin de Damas, l’autre, l’épisode du Quo vadis ? dans lequel le Christ apparaît à l’apôtre Pierre, tenté de renoncer à sa mission.
Le sanctuaire St Roch dispose d’un orgue construit en 1845 par la maison Daublaine et Callinet et installé en 1874 par la maison Puget de Toulouse. Malgré une qualité de facture indéniable et une belle sonorité, cet instrument est dans un état d’usure avancé et mériterait des travaux de restauration importants.
Résumé de la vie de Saint Roch
Roch naquit à Montpellier entre 1348 et 1350, à l’époque du rattachement de la ville à la couronne de France (1349). Alors que le royaume était confronté à la guerre de Cent Ans et aux ravages de la peste noire, la cité de Montpellier était une république marchande, active, cosmopolite, déjà réputée pour son université. Étape du pèlerinage de St Jacques de Compostelle sur la via tolosana, elle bénéficiait de la proximité d’Avignon, siège de la Papauté depuis le début du XIV°siècle.
Le père de Roch, nommé Jean Roch de la Croix par certains biographes, était un dignitaire de la ville. Son nom figure sur la liste des consuls donnée par le Petit Thalamus pour l’année 1363. Sa mère, selon la tradition, se serait nommée Libéra et aurait été originaire de Lombardie. Roch fut probablement baptisé à l’église Notre-Dame des Tables, qui était alors le centre spirituel de la ville. Il fit sa scolarité chez les dominicains avant d’étudier la médecine à l’université. Il connut l’épidémie de peste de 1358 et celle de 1361 qui, à Montpellier, fit jusqu’à cinq cents morts par jour pendant trois mois. Ses deux parents étant décédés, il décida, peu avant ses vingt ans, de renoncer aux études médicales et de partir pour Rome. Ayant fait don de tous ses biens aux pauvres, il rejoignit le Tiers Ordre franciscain, revêtit l’habit du pèlerin et, béni par l’évêque de Maguelone, prit la route en longeant la Méditerranée. Il arriva en juillet 1367 dans la petite ville d’Acquapendente, à quelques jours de marche de Rome et y resta trois mois, car la peste y sévissait. Grâce à l’enseignement médical qu’il avait reçu et qu’il associait à des signes de croix sur le corps des souffrants, il obtint de nombreuses guérisons. Arrivé à Rome au début de l’année 1368, il s’occupa des malades de l’hôpital du Saint-Esprit – ordre fondé par son compatriote Gui de Montpellier et rencontra le pape Urbain V, venu tenter de réinstaller la papauté à Rome. Roch reprit la route en 1370 pour retourner vers sa patrie par la via flaminia et la via émilia. En mai 1371, il s’arrête à Plaisance (Piacenza) et vient à l’hôpital Notre-Dame de Bethléem où il assiste et guérit des malades. Atteint à son tour par la peste, Roch se rend au bois de Sarmato pour y attendre la mort. À cet endroit, près d’une source jaillie miraculeusement, un chien lui apporte chaque jour un pain. Le maître du chien est le noble Gothard Perestrelli qui va devenir son disciple et se faire ermite.
Grâce à lui, Roch put reprendre sa route, mais les terres milanaises qu’il avait à traverser étaient le théâtre d’une guerre entre le duc de Milan, Barnabo Visconti, et la ligue constituée par le pape Urbain V et conduite par Amedeo VI de Savoie. Pris pour un espion du pape, Roch fut arrêté à Broni et transféré à Voghera par l’intendant militaire des Visconti. Sa renommée de guérisseur des pestiférés était déjà grande, mais fidèle au vœu d’anonymat des pèlerins, Roch ne révéla pas son identité à ses géôliers et demanda à pouvoir reprendre son chemin en tant qu’ « humble serviteur de Dieu ». Au lieu de cela, il resta emprisonné pendant cinq ans. Selon la tradition, il ne dévoila son identité qu’à un prêtre, à la veille de sa mort survenue le 16 août 1378 (1379 ou 1380). Il fut enterré avec dévotion à Voghera, où, dès 1382, un sanctuaire et une fête honorèrent sa mémoire. Ses reliques, déposées dans l’église qui lui fut consacrée par cette ville, furent dérobées en février 1485 et transportées à Venise où elles furent déposées à la Chiesa San Rocco. Quelques-unes d’entre elles furent offertes au sanctuaire Saint-Roch de Montpellier, qui conserve aussi un morceau de son bourdon. Saint Roch est le patron des pestiférés, des lépreux et de tous ceux qu’une maladie rare exclut de la vie sociale. Il continue à faire l’objet d’une grande dévotion dans le sud de la France, en Corse, dans le nord de l’Italie, en Belgique et en Allemagne. Après la Vierge, il est le saint qui a donné son nom au plus grand nombre de chapelles et d’églises. Aujourd’hui, sa fête, célébrée le 16 août, donne lieu à de grandes cérémonies au Brésil et au Canada.